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Jacques Barrot : Identités et métissage

CONFÉRENCE DE JACQUES BARROT

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Aujourd’hui membre du Conseil constitutionnel, Jacques Barrot est venu faire partager aux participants de l’UEA son expérience d’ancien commissaire européen chargé des questions d’immigration. Un poste où il sest longuement penché sur la question méditerranéenne.

Nous sommes en plein paradoxe en matière d’immigration : nous sommes en même temps en déclin démographique (l’Europe va perdre 20 millions d’habitants à l’horizon 2030, un Français sur deux aura moins de 50 ans alors) ; dans le même temps, l’Afrique va doubler sa population de deux milliards d’Africains ; la force asiatique entre l’Inde et la Chine va représenter un tiers de l’humanité. Ce monde va beaucoup changer et ce monde va être le monde des migrations.

Il y aura la nécessité d’appeler des gens pour relayer nos actifs et il y aura une poussée de gens qui, pour des raisons économiques, voudront réussir leur vie, aller dans les pays les plus en pointe de développement, et ceux qui fuiront les problèmes climatiques.

Mais aujourd’hui, dans un monde partout en crise, les Etats ont des positions plutôt restrictives. Par exemple, les Israéliens qui renvoient des enfants, ou encore, en Arizona, où toute immigration illégale est devenue un délit. Aussi, le Japon a eu besoin d’immigration et vient de donner un coup de frein en rapatriant des Brésiliens.

En France, l’histoire de la migration, après la guerre de 1870 et la perte de l’Alsace-Lorraine, nous avons eu une propension à réunir, à franciser le plus grand nombre d’immigrés possibles. Nous avons une tradition de droit du sol : la France a été en pointe et très ouverte. Nous avons eu une réaction, dans les années 1980, avec la première crise sérieuse qui nous a valu beaucoup de chômage et une tendance à restreindre l’immigration.

Dans les années 2000, en 2005 par exemple, Nicolas Sarkozy a évoqué l’immigration choisie où nous choisissons ceux dont on a besoin et où nous sommes plus restrictifs sur les arrivées familiales. En 2007, nous avons définis une liste de métiers dont nous avons besoin. Mais cela donne le sentiment d’une navigation à vue : le défaut des politiques, c’est d’être un peu myope alors que l’essence du politique est de regarder l’avenir.

Le problème est d’ouvrir l’immigration régulière et de lutter contre l’immigration irrégulière. Nous avons, durant la présidence française, fait signer à tous les états membres le pacte sur l’immigration et l’asile. Sur l’immigration régulière, nous avons eu plusieurs textes et nous avons essayé de créer une carte bleue, mais l’Europe n’est pas assez attractive par rapport aux Etats-Unis. J’ai essayé de créer un cadre juridique pour les travailleurs saisonniers qui ont souvent été très exploités et n’avaient pas de cadre juridique, et aussi pour les stagiaires rémunérés, sur un cadre commun européen.

Dans le même temps, il faut lutter contre l’immigration irrégulière (6 à 8 millions d’immigrés sans papiers à travers l’Europe). Cela implique plusieurs efforts : une très bonne surveillance des frontières (création de Frontex à Varsovie), une meilleure gestion des visas (à expiration des visas, des personnes qui restent clandestins). L’immigration irrégulière s’est beaucoup ralentie ces derniers temps à cause de la crise européenne et des accords avec certains pays (comme celui que l’Espagne a passé avec le Maroc). Mais il demeure le problème des passeurs, notamment au sud et à l’est de l’Europe. Il y a eu des drames effroyables ces dernières années (3 000 morts noyés dans la mer méditerranée). L’île italienne Lampedusa, et surtout Malte, sont très exposées. Ce qui est dramatique est que, dans ces immigrants irréguliers, certains viennent pour des raisons économiques mais il y a aussi des demandeurs d’asile en danger. Eux utilisent les passeurs aussi.

Le grand espace européen de Shenguen pose problème.

On essaie de lutter contre ces migrations irrégulières. Qu’est-ce qu’on a fait ? On a pris une directive retour, que l’on a appelé directive de la honte, mais c’est un peu exagéré. Nous avons un certain nombre de règles pour les centres de rétention. Mais il y a encore beaucoup de problèmes : lorsque l’on accueille un immigré irrégulier, il faut qu’il soit traité dignement et que l’on joue le retour volontaire. Nous avons aussi créé une directive transposée dans la plupart des pays qui punit sérieusement les employeurs de travailleurs clandestins. Mais ce n’est pas facile de surveiller ce grand espace de Schengen qui est libre, parce que beaucoup d’immigrés irréguliers voudraient aller en Angleterre, porte du Commonwealth.

Pour que l’immigration régulière marche bien, il faut une politique d’intégration très forte et sur laquelle nous sommes très faibles et pour laquelle l’Europe devrait faire porter des efforts majeurs. Nous avons quatre fonds qui interviennent : le fond d’intégration, le fond des frontières extérieures pour la surveillance, un fond réfugié et un fond européen pour le retour. Mais les moyens budgétaires sont insuffisants, en particulier les moyens du fond d’intégration. L’immigration peut être enrichissante sur le plan culturel mais il faut l’intégration. L’intégration se joue sur plusieurs claviers : lutte contre les discriminations, l’apprentissage de la langue, les droits politiques locaux, lutte contre les inégalités sociales. Mais en France, nous avons laissé trop territorialiser cette immigration et n’avons pas su former la 3ème génération d’immigrés. Mais il faudra se préparer à une politique d’accueil et une intégration forte pour tirer partie de l’immigration.

jacques_barrot_01Nous sommes en plein paradoxe en matière d’immigration : nous sommes en même temps en déclin démographique (l’Europe va perdre 20 millions d’habitants à l’horizon 2030, un Français sur deux aura moins de 50 ans alors) ; dans le même temps, l’Afrique va doubler sa population de deux milliards d’Africains ; la force asiatique entre l’Inde et la Chine va représenter un tiers de l’humanité.

Ce monde va beaucoup changer et ce monde va être le monde des migrations. Il y aura la nécessité d’appeler des gens pour relayer nos actifs et il y aura une poussée de gens qui, pour des raisons économiques, voudront réussir leur vie, aller dans les pays les plus en pointe de développement, et ceux qui fuiront les problèmes climatiques.

Mais aujourd’hui, dans un monde partout en crise, les Etats ont des positions plutôt restrictives. Par exemple, les Israéliens qui renvoient des enfants, ou encore, en Arizona, où toute immigration illégale est devenue un délit. Aussi, le Japon a eu besoin d’immigration et vient de donner un coup de frein en rapatriant des Brésiliens.

En France, l’histoire de la migration, après la guerre de 1870 et la perte de l’Alsace-Lorraine, nous avons eu une propension à réunir, à franciser le plus grand nombre d’immigrés possibles. Nous avons une tradition de droit du sol : la France a été en pointe et très ouverte. Nous avons eu une réaction, dans les années 1980, avec la première crise sérieuse qui nous a valu beaucoup de chômage et une tendance à restreindre l’immigration.

Dans les années 2000, en 2005 par exemple, Nicolas Sarkozy a évoqué l’immigration choisie où nous choisissons ceux dont on a besoin et où nous sommes plus restrictifs sur les arrivées familiales. En 2007, nous avons définis une liste de métiers dont nous avons besoin. Mais cela donne le sentiment d’une navigation à vue : le défaut des politiques, c’est d’être un peu myope alors que l’essence du politique est de regarder l’avenir.

Le problème est d’ouvrir l’immigration régulière et de lutter contre l’immigration irrégulière. Nous avons, durant la présidence française, fait signer à tous les états membres le pacte sur l’immigration et l’asile.

jacques_barrot_02Sur l’immigration régulière, nous avons eu plusieurs textes et nous avons essayé de créer une carte bleue, mais l’Europe n’est pas assez attractive par rapport aux Etats-Unis. J’ai essayé de créer un cadre juridique pour les travailleurs saisonniers qui ont souvent été très exploités et n’avaient pas de cadre juridique, et aussi pour les stagiaires rémunérés, sur un cadre commun européen.

Dans le même temps, il faut lutter contre l’immigration irrégulière (6 à 8 millions d’immigrés sans papiers à travers l’Europe). Cela implique plusieurs efforts : une très bonne surveillance des frontières (création de Frontex à Varsovie), une meilleure gestion des visas (à expiration des visas, des personnes qui restent clandestins).

L’immigration irrégulière s’est beaucoup ralentie ces derniers temps à cause de la crise européenne et des accords avec certains pays (comme celui que l’Espagne a passé avec le Maroc). Mais il demeure le problème des passeurs, notamment au sud et à l’est de l’Europe. Il y a eu des drames effroyables ces dernières années (3 000 morts noyés dans la mer méditerranée). L’île italienne Lampedusa, et surtout Malte, sont très exposées. Ce qui est dramatique est que, dans ces immigrants irréguliers, certains viennent pour des raisons économiques mais il y a aussi des demandeurs d’asile en danger. Eux utilisent les passeurs aussi.

Le grand espace européen de Shenguen pose problème. On essaie de lutter contre ces migrations irrégulières. Qu’est-ce qu’on a fait ? On a pris une directive retour, que l’on a appelé directive de la honte, mais c’est un peu exagéré. Nous avons un certain nombre de règles pour les centres de rétention. Mais il y a encore beaucoup de problèmes : lorsque l’on accueille un immigré irrégulier, il faut qu’il soit traité dignement et que l’on joue le retour volontaire. Nous avons aussi créé une directive transposée dans la plupart des pays qui punit sérieusement les employeurs de travailleurs clandestins. Mais ce n’est pas facile de surveiller ce grand espace de Schengen qui est libre, parce que beaucoup d’immigrés irréguliers voudraient aller en Angleterre, porte du Commonwealth.
Pour que l’immigration régulière marche bien, il faut une politique d’intégration très forte et sur laquelle nous sommes très faibles et pour laquelle l’Europe devrait faire porter des efforts majeurs. Nous avons quatre fonds qui interviennent : le fond d’intégration, le fond des frontières extérieures pour la surveillance, un fond réfugié et un fond européen pour le retour. Mais les moyens budgétaires sont insuffisants, en particulier les moyens du fond d’intégration.

L’immigration peut être enrichissante sur le plan culturel mais il faut l’intégration. L’intégration se joue sur plusieurs claviers : lutte contre les discriminations, l’apprentissage de la langue, les droits politiques locaux, lutte contre les inégalités sociales. Mais en France, nous avons laissé trop se territorialiser cette immigration et n’avons pas su former la 3ème génération d’immigrés. Mais il faudra se préparer à une politique d’accueil et une intégration forte pour tirer partie de l’immigration.

L’idée dans les politiques européennes est d’avoir des partenariats avec les pays d’origine. Comme, par exemple, le partenariat avec le Cap Vert, qui lutte contre l’immigration irrégulière et fait la chasse aux passeurs. Nous avons donné des visas de 10 ans à des travailleurs venus du Cap Vert. C’est très positif mais très difficile, parce que le président du Sénégal dira : je veux bien un accord bilatéral avec la France mais je ne suis pas très riche et l’argent que me renvoient les immigrés qui sont en France ou en Europe, c’est trois fois l’argent que vous donnez pour le développement.

Le cœur du sujet, c’est l’aide au développement. D’ailleurs, les Espagnols se sont organisés pour examiner avec le gouvernement marocain les régions d’où venaient les migrants irréguliers. Ils ont ouverts une coopération avec le Maroc, dont des centres de formation pour se former et rester au Maroc. Et le problème, c’est éviter la fuite des cerveaux. A Manchester, il y a plus de médecins du Malawi qu’il y en a au Malawi. Il faut avoir le soucis de renvoyer une élite à ces pays, le moment venu.

L’asile. Dans les flux, il y a beaucoup de demandeurs d’asile et il faut faire le tri. Par définition, un demandeur d’asile est un homme ou une femme persécuté. Pour l’échéance 2012, nous préparons une politique européenne de l’asile. Le règlement de Lisbonne a été revu pour qu’un demandeur d’asile, s’il est en Allemagne, même s’il a fait ses premiers pas en Grèce, ne soit pas systématiquement renvoyé en Grèce. Maintenant, on regarde si les gens ont une famille en Europe ou des liens avec leur communauté d’origine, et on essaie de les renvoyer dans le pays où cette demande d’asile sera plus facile à instruite (dans la mesure où la demande est valable). On a harmonisé a peu près les procédures de protection, on a créé un fichier de demandeurs d’asile. On a progressé, mais restent les problèmes d’harmonisation de procédures et les conditions d’accueil pendant l’instruction des demandes d’asile. Ces demandes sont longues à instruire – elles peuvent durer un an.

Il faut avoir à l’esprit que le problème des migrations va dominer les prochaines années. Ce phénomène est inéluctable : nous en avons besoin et il y aura des gens qui voudront venir parce qu’il n’ont pas de futur chez eux. Ce qu’il faut, c’est que la mobilité deviennent quelque chose de plus normalisée : assouplir la procédure de renouvellement des visas, il faut des visas à entrée multiple, organiser la migration circulaire et il faut des bourses d’étude, par exemple, pour les étudiants africains.

L’Union pour la Méditerranée a deux faiblesses initiales : L’Union pour la Méditerranée a été conçue comme une espèce d’antidote à l’Union européenne. Or c’est absurde : la plupart de l’argent vient de l’Europe et vient notamment de nos amis allemands qui sont les premiers contributeurs. Il fallait que les Européens s’intègrent tous dans l’Union pour la Méditerranée, pas nécessairement au même point les uns et les autres, mais écarter l’Allemagne était absurde. On a parlé de structure mais il fallait parler de « projet ». Et les projets, comme faire une Méditerranée propre, un tribunal d’arbitrage pour éviter les pays du Sud où la justice n’est pas toujours rendue de manière équitable, permettent aussi aux investisseurs d’avoir des arbitrages solides.

J’espère que l’Union pour la Méditerranée va retrouver ses fondements qui sont essentiels pour sa réussite car c’est une très bonne idée. Mais les bases n’étaient pas bonnes. Cela peu être un lieu où l’on peut faire la rencontre entre nos grands monothéismes, mais, tant que le problème israélo-palestinien ne sera pas réglé, ce sera très difficile de monter une structure. N’ayons pas peur du métissage, sans oublier quand même, que nous avons un fort héritage chrétien qui vaut la peine d’être revendiqué quand il le faut.

 

Échange avec les participants


jacques_barrot_03Est-ce que vous estimez que les migrants sont traités humainement dans l’Union européenne ? Est-ce qu’à votre sens il y a ce que l’on peut entendre chez certains une « chasse à l’étranger » ?

Je crains, en effet, actuellement un peu une fermeture d’un certain nombre d’états membres. On a beaucoup trop ouvert les frontières. Certains grandes villes des Pays-Bas auront inévitablement des maires musulmans. Cela provoque un reflux et des réactions qui nous inquiètent beaucoup. Nous avons d’autres exemples, le Danemark et l’Irlande se sont montrés très attentifs à fermer en partie leur frontière. D’une manière générale, la difficulté que nous avons à faire accepter ne serait-ce que les textes sur l’asile montre bien la frilosité des gouvernements. Je ne crois pas qu’il y ait de « chasse à l’étranger » en tant que tel en Europe. Mais il y a un mouvement de replis assez général et inquiétant.

Les Roms sont des citoyens européens et donc on n’est pas tout à fait dans la même logique. Comment voyez-vous le problème ?
Le problème des Roms est un problème extrêmement difficile. Les Roms sont surtout originaires d’Europe centrale, de Roumanie et Bulgarie, et ce n’est pas là qu’ils sont le mieux traités, loin de là. Ils ont tendance à quitter la Roumanie et la Bulgarie et à aller en Italie et en France ou en Allemagne, et ils sont arrivés en grand nombre.
La politique européenne n’a pas vu le problème rom. On a créé un fond pour l’intégration des Roms mais le problème rom est un problème très difficile à solutionner. Le problème peut être traité de manière convenable et conforme aux autres citoyens, mais en même temps c’est une population qui, d’une certaine manière, est un peu rétive à la formation des jeunes, à la formation des enfants, qui n’envoient pas ses enfants à l’école. Et je crois que nous n’avons pas vu ce problème à temps et quand nous avons fait entrer la Bulgarie et Roumanie, nous aurions dû demander aux gouvernements en place ce qu’ils comptaient faire. On a été un peu vite pour les faire entrer dans l’Union européenne, sans poser ces exigences.

Concernant les frontières extérieures de l’Europe, vous avez évoqué la question des personnes qui ont un visa qui expire et restent en Europe. Est-ce que finalement cette fermeture des frontières n’a pas eu un effet paradoxale : auparavant les aller-retour se faisaient peut-être plus facilement. Est-ce que rouvrir les frontières permettrait des aller-retour plus faciles et donc peut-être une meilleure régulation ?
Mais ça veut dire des migrations régulières. Il faut que nous soyons plus souples pour les migrations régulières et il faut quand même que nous soyons très sévères pour les migrations irrégulières. Il faut bien le dire, elle sont organisées par des intermédiaires qui sont souvent des gens très proches du trafic de drogue, de tous les trafics possibles et de la prostitution.
Sur ce point, il ne faut pas être angélique à propos de l’immigration irrégulière, les intermédiaires sont vraiment des gens très condamnables. Les immigrés eux-mêmes passent par ces passeurs, c’est pourquoi je suis tout à fait hostile à faire de l’immigration irrégulière un délit mais il faut être très sévère sur les passeurs. Il faut être assez rigoureux, mais ça veut dire, en même temps, que l’on fait une migration régulière avec une plus grande souplesse pour les visas.

Dans cette immigration régulière, on a entendu le concept d’immigration choisie, est-ce qu’il n’y a pas un risque de priver des pays du Sud de leurs élites, des gens qui ont été les mieux formés et de les maintenir dans une pauvreté, un sous-développement en chassant les têtes ?
Je n’aime pas le mot immigration choisie ! J’ai tout fait pour que l’on parle d’immigration concertée parce que l’immigration, c’est en effet un peu de brain trust. On choisit les meilleurs et on prive les pays de leurs élites. On ne peut pas laisser ces pays qui sont en train de se développer et cela ne peut se faire que par concertation.

Et pour les immigrés sans papiers en Europe, quelle est la solution ? Est-ce qu’il faut des régularisations massives ?
Dans le pacte pour l’immigration et l’asile, les différents gouvernements sont interdits de procéder à des régularisations massives, ce que je crois une bonne chose (Par exemple, les régularisations massives de Zapatero en Espagne). Par contre, on ne peut pas écarter des régularisations qui doivent faire l’objet d’un examen attentif et, dans la mesure du possible, quand il y a une famille, quelqu’un qui a montré sa volonté de travail et d’intégration, il faut admettre que certaines régularisations sont nécessaires.

Un sondage CSA publié par La Croix ce matin montre que un Français sur deux estime que l’Eglise est sortie de son rôle en prenant position sur la politique gouvernementale au sujet des roms, qu’en pensez-vous ?
S’il y a des commentaires excessifs, adressez-vous à la presse, mais l’Eglise est dans son rôle aussi quand elle rappelle qu’il faut traiter humainement les personnes humaines. Mais il faut faire attention et ne pas tomber dans l’angélisme. Le problème est difficile : vous avez aussi dans la communauté rom des éléments qui posent problème, qui sont parfois très proches de la drogue et des milieux mafieux. Il faut faire preuve de discernement. Il faut faire très attention et nous ne pouvons pas non plus ne pas proposer des solutions positives. Et François Fillon, en saisissant le président de la Commission européenne, a eu raison, dans la mesure où il a dit qu’il faut vraiment que l’Europe prenne le taureau par les cornes.

Dans le métissage il y a aussi des gens d’origine étrangère qui prennent la nationalité française ou la citoyenneté européenne, par naturalisation ou par naissance. Qu’est ce qu’on fait aujourd’hui en Europe pour sensibiliser les européens à ce besoin d’un sang neuf et quel travail est fait aussi auprès des populations qui arrivent pour les faire entrer dans notre culture ?
Globalement, il manque de la pédagogie pour faire comprendre les données démographiques élémentaires que j’expliquais au début (situation en 2030). Mais c’est très difficile de faire de la pédagogie, selon les auditoires, par exemple certains sont sensibles au chômage et en particulier au chômage des jeunes. Ouvrir les frontières par générosité, ce n’est pas possible non plus. On comprend bien la situation à court terme et la situation à long terme. Il faut quand même continuer à garder un regard positif, par rapport à l’étranger, à celui qui vient d’ailleurs. C’est essentiel, cela fait partie des valeurs chrétiennes.

Vous dites que l’on ne peut pas ouvrir les frontières comme ça mais on voit dans la mondialisation aujourd’hui l’argent, les marchandises circulent très librement. Les gens pas trop. Finalement le message donné n’est-il pas que la libre circulation est la libre circulation des gens riches ? Est-ce que ce n’est pas le message donné à ceux qui sont sur l’autre rive de la Méditerranée ?
C’est vrai que l’immigration pour le moment reste le privilège d’une génération qui a des connaissances linguistiques qui leur permettent de s’adapter très facilement. Ce qui n’est pas le cas des gens modestes.
Mais il y a des moyens aujourd’hui qui permettent, avec Internet notamment, l’accélération de la formation des gens qui seront plus aptes alors à saisir des opportunités de mobilités. Aujourd’hui, ce sont surtout des pauvres qui cherchent un futur. C’est une période de transition difficile à gérer.
La mondialisation, ça accélère beaucoup et la zone de Schengen c’est quelque chose d’extraordinaire. Je suis pour le développement des projets Erasmus pour que la nouvelle génération parle sa langue maternelle et au moins deux langues, pour en faire des citoyens à la mesure des nouveaux enjeux. Nous devons porter un message d’espoir.

La Turquie, c’est l’Europe ?
Aujourd’hui nous n’avons pas les moyens financiers d’intégrer la Turquie. Cela exigerait un tel effort de solidarité que nous ne pouvons pas. Ce qu’il faut, c’est renforcer notre aide à la Turquie. Nous ne pouvons pas introduire la Turquie en tant que telle dans l’Union européenne ce serait très compliqué (taille de la population).
Moi, je milite pour une politique de voisinage avec des partenariats très spécifiques avec la Turquie. Mais pour le moment, il faut consolider l’Europe, notamment au niveau des Balkans. Il faut une politique européenne très généreuse mais il faudra mettre les moyens.

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